jeudi 24 février 2011

Les verts fédéraux mèneront une campagne plus ambitieuse

Un congrès à Montréal aujourd'hui permettra d'établir une stratégie ciblée pour le Québec

Alec Castonguay , Guillaume Bourgault-Côté
Le Devoir - 19 février 2011 Canada

Après six mois de travail, la chef du Parti vert du Canada, Elizabeth May, dresse un bilan positif de la contribution de son chef adjoint, le hockeyeur Georges Laraque, même si on l’a davantage vu dans des activités hors contexte depuis l’automne, notamment aux émissions Battle of the Blades et Le Match.
Sonné par son fiasco au Québec lors des élections générales de 2008, le Parti vert du Canada souhaite faire mieux lors du prochain scrutin. Avec une stratégie pour conquérir la province, les verts veulent tripler le nombre de vote et gruger des appuis au Bloc québécois. Mais la lutte s'annonce difficile.

Le Parti vert du Canada (PVC) a vu ses appuis grimper dans toutes les provinces entre les élections de 2006 et de 2008. Partout... sauf au Québec. Malgré la présence de la chef Elizabeth May au débat des chefs et la forte sensibilité des Québécois pour les questions environnementales, le parti a récolté 125 803 votes au Québec (3,5 %) en 2008, soit 20 773 de moins qu'en 2006. À part le maigre 1,7 % enregistré à Terre-Neuve, ce fut son pire résultat au pays. «On va être honnête, ça n'a pas bien été», dit Benoît Michaud, l'un des nouveaux organisateurs régionaux au Québec et porte-parole du parti dans le centre du Québec.

Le Québec, en raison de sa langue, de sa culture et de la présence d'un parti régional dominant comme le Bloc québécois, présente un mélange politique que le Parti vert n'a jamais réussi à maîtriser. Pour y remédier, la formation a mis sur pied une aile québécoise en novembre 2009, une première au pays (la Colombie-Britannique compte une division régionale). Les militants se réuniront d'ailleurs en assemblée générale cette fin de semaine à Montréal pour mettre la touche finale à la préparation électorale. Mais déjà, des objectifs et des tactiques se dessinent.

Sur le plan de l'organisation, le PVC veut tripler le nombre de ses membres au Québec. Ils sont actuellement 579, sur un total national de 8632, soit 6,7 % pour une population qui représente pourtant près du quart du pays. N'empêche: des militants nombreux et dynamiques permettent de diffuser le message du parti, affirme-t-on.

Le parti espère aussi augmenter le nombre d'associations de circonscription, qui se situe à 39 (sur 75). «Notre militantisme est jeune. On est conscient qu'on doit remédier à ce déficit d'associations», dit M. Michaud, ajoutant que le PVC «part de loin».

L'effet Laraque

Au Québec, le parti a toujours obtenu des résultats modestes: 4 % en 2006, 3,2 % en 2004, 0,6 % en 2000... En novembre 2009, l'embauche de l'ancien journaliste de Radio-Canada, Jacques Rivard, comme chef adjoint du parti devait permettre de redresser la barre et de mieux structurer les verts au Québec. Résultat: M. Rivard a «déchanté» en moins de sept mois et a décidé de se joindre au Bloc québécois. À l'époque, il confiait avoir «constaté que les moyens limités des verts n'offrent malheureusement pas la possibilité de vraiment faire progresser les intérêts environnementaux au Québec», et dénonçait des problèmes de communication entre l'aile québécoise et la base nationale.

C'est dans ce contexte qu'Elizabeth May a engagé l'ancien hockeyeur Georges Laraque comme chef adjoint en juillet dernier. Sans expérience politique, M. Laraque a été recruté pour une raison: sa popularité et sa capacité à attirer l'attention du public et des médias. Après six mois de travail, Elizabeth May a dressé cette semaine un bilan positif de la contribution de Georges Laraque — même si on l'a davantage vu dans des activités hors contexte depuis l'automne, participant notamment aux émissions Battle of the Blades, Le Match ou Canada Reads.

«Chaque fois qu'il a l'occasion de parler, il encourage les gens à aller voter, indiquait Mme May mercredi. Il a fait beaucoup d'événements sur le terrain, il amène quelque chose de différent. Pour nous, c'est une façon de passer notre message auprès d'une nouvelle clientèle.» Les militants apprécient aussi sa présence dans les soirées de financement. «Ça aide à attirer du monde», dit un organisateur qui a requis l'anonymat. L'ancien homme fort du Canadien n'a toutefois pas l'intention de se présenter au prochain scrutin.

Alors que les sondages indiquent une légère augmentation des appuis des verts au Québec (environ 6 % actuellement), Mme May fait preuve d'un certain optimisme pour les prochaines élections. «Nous avons encore beaucoup de potentiel de croissance. Nous avons de bons candidats [39 ont été choisis à l'heure actuelle] qui devraient nous permettre des résultats plus significatifs qu'en 2008», pense-t-elle.

Stratégie québécoise

Pour s'assurer de concrétiser ce souhait, le PVC entend mettre en oeuvre une stratégie propre au Québec, avec notamment un slogan et des publicités adaptées. Des publicités à la télé en français devraient être mises en ondes.

De manière générale, «on peut s'attendre à quelque chose de plus ambitieux qu'en 2008», dit Benoît Michaud. Une douzaine de circonscriptions auront une attention particulière, soit celles ayant obtenu plus de 5 % des voix en 2008. «Et parmi celles-là, on va en cibler deux ou trois en particulier», affirme M. Michaud. «On ne va pas changer toute la dynamique politique au Québec en une seule élection, on est conscient de ça, mais on veut augmenter assez nos appuis pour devenir un parti dont on doit tenir compte», ajoute-t-il.

Le public cible? Les francophones qui votent pour le Bloc québécois. Le parti estime partager beaucoup de valeurs avec les électeurs du Bloc, sauf celle de la souveraineté. «On va marteler le message que la souveraineté, ça va se régler au Québec, pas à Ottawa. En attendant, l'urgence, c'est l'environnement, les changements climatiques, dit M. Michaud. Il faut envoyer des députés pour qui c'est la principale préoccupation.»

Le PVC estime ne pas être un parti de droite ou de gauche, ce qui pourrait séduire dans un contexte où les «vieux partis ennuient les gens», croit-on. «C'est une nouvelle façon d'arrimer l'environnement et l'économie. On peut faire évoluer le discours et les politiques publiques», dit M. Michaud. Reste à convaincre la population d'embarquer...
Le Devoir, samedi 19 février 2011.

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